Les Rohingyas du Myanmar
Selon l'Organisation des Nations Unies, environ 10 à 20 % de la population mondiale, soit entre 600 millions et 1,2 milliard de personnes vivent dans une situation de minorité. Elles ont donc besoin de la mise en place de certaines mesures afin d'assurer la protection de leurs droits. Ces communautés font souvent face à de la discrimination, des injustices et de l'exclusion. Seulement en Asie du Sud-est, il est possible de compter plus de 350 minorités ethniques, dont les Rohingyas.
https://www.universalis.fr/atlas/asie/asie-du-sud-est/birmanie/ |
Ce peuple peut prouver ses origines sur le territoire actuel du Myanmar, où demeurait auparavant une grande partie des 3.5 millions de Rohingyas dans le monde, jusqu'au quinzième siècle. Des milliers d'individus pratiquant l'islam sunnite (la branche la plus pratiquée de l'islam) ont alros migré vers le royaume d'Arakan (aujourd'hui l'état du Rakhine au Myanmar). D'autres sont arrivés pendant les dix-neuvième et vingtième siècles, quand le territoire faisait partie de l'Inde britannique. En 1948, le pays obtient son indépendance et devient la Birmanie jusqu'en 1989, où il change son nom pour Myanmar. À travers les années, les différents gouvernements ont continuellement nié la présence historique ainsi que la reconnaissance des Rohingyas en tant que groupe ethnique officiel du pays. Il est important de mentionner que le Myanmar est un pays majoritairement bouddhiste et les moines ont aidé à alimenter le conflit en faisant passer des messages islamophobes à travers ses adeptes.
https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2017/11/myanmar-apartheid-in-rakhine-state/ |
Avec l'indépendance du Myanmar et de la rédaction de sa première constitution en 1948, les lois concernant la citoyenneté du peuple des Rohingyas étaient déjà restrictives. En 1962, il y a eu une junte militaire et les droits de cette communauté ont grandement diminué. Vingt ans plus tard, le gouvernement (qui était toujours contrôlé par l'armée myanmaraise) fait passé une loi retirant la citoyenneté à tout cette ethnie, la rendant apatride. Les Rohingyas pouvaient alors s'inscrire en tant que résidants temporaires. Cette inscription leur laissait certains droits (comme le droit de vote), mais ne leur offrait pas une citoyenneté. Les nationalistes bouddhistes ont même, lors d'un référendum en 2015, demandé une modification de la constitution pour retirer à ce peuple le droit de vote. Aujourd'hui, la communauté des Rohingyas forme la plus grande communauté apatride au monde.
https://www.nytimes.com/2019/09/24/opinion/rohingya-refugees-myanmar-return-bangladesh.html |
L'exode des Rohingyas a réellement commencé en 2017. Cela faisait plusieurs années, voire des décennies, que ce peuple se faisait maltraiter, mais les horreurs ont réellement commencé cette année-là. La violence envers ce groupe minoritaire s'est aggravée et ses individus ont vécu de nombreux viols, meurtres et incendies volontaires. Le tout était surtout alimenté par l'armée. Ces actions ont causé des migrations de masse de la part de la communauté des Rohingyas. La majorité a fui vers le Bangladesh par voie de terre, mais amplement de familles ont aussi choisi de se réfugier en Indonésie, en Malaisie ainsi qu'en Thaïlande en utilisant les voies maritimes.
Avant le mois d'août 2017, le Myanmar habitait environ le tiers de tous les Rohingyas dans le monde, et la majorité vivait dans l'état du Rakhine, comme mentionné plus haut. Avant la fin de l'année, plus de 760 000 Rohingyas avaient quitté le Myanmar pour se réfugier dans un autre pays. Après seulement un mois, il y avait plus de 6 700 membres de cette minorité qui s'étaient fait tuer par les troupes nationales et plus de 288 villages étaient brûlés.
https://www.britannica.com/biography/Aung-San-Suu-Kyi |
À la tête du gouvernement se retrouvait Aung San Suu Kyi, fille de l'un des principaux fondateurs du pays et récipiendaire du prix Nobel de la paix en 1991. Cette femme a souvent été comparée avec Nelson Mandela, ce qui a causé beaucoup de déception chez ses admirateurs quand elle préférait garder le silence sur les horreurs vécu régulièrement par les Rohingyas. Plusieurs avaient même commencé à la critiquer. Avec l'aide de son gouvernement, la première ministre Aung San Suu Kyi défendait l'armée et publiait de fausses informations sur les actions de celle-ci. Elle a même refusé les enquêtes de plusieurs représentants des Nations Unies. Par contre, il faut mentionner que malgré le fait que le pays était une démocratie, le gouvernement n'avait aucun contrôle sur l'armée. L'ONU avait déclaré que les actes commis par l'armée étaient en accord avec un génocide ou encore une purification ethnique, ce que l'ancienne première ministre a refusé d'admettre.
https://www.nrc.no/news/2018/august/coxs-bazar-the-worlds-largest-refugee-settlement/ |
En août 2022, il était possible de compter plus de 760 000 Rohingyas au Bangladesh et environ 600 000 résidaient encore au Myanmar, subissant toujours l'oppression du gouvernement. Aujourd'hui, près d'un million de réfugiés de cette communauté vivent à Cox's Bazar, au Bangladesh, faisant de ce lieu le plus grand camp de réfugiés au monde. Ils dépendent entièrement sur l’aide humanitaire pour recevoir de la protection, de la nourriture, de l’eau et des soins de santé. Depuis, ils vivent dans des abris temporaires et les camps sont encombrés d’autres réfugiés.
https://www.dw.com/en/dozens-missing-after-rohingya-refugee-boat-capsizes/a-58868255 |
Le Bangladesh est déjà surpeuplé par sa propre population, donc le nombre de réfugiés n'aide pas la situation dans le pays. Une solution présentée par le gouvernement est la délocalisation de certaines familles de réfugiés sur l'île de Bhashan Char, dans le Golfe du Bengale. Cette île a été développée par l'armée bangladaise et est formée par des dépôts de limon. L'objectif des autorités est de réinstaller environ 100 000 réfugiés rohingyas sur l'île afin d'alléger les impacts de leur présence dans le pays ayant déjà une trop grande population natale. Après début du projet en 2020, cinq personnes représentant les familles des Rohingyas délocalisées ont admis à Amnesty International qu'ils ont accepté la délocalisation sur l'île à cause de la pression des autorités, pas par choix. Aussi, plusieurs craignent pour la sécurité de l'île. Après tout, elle a été formée il y a seulement une vingtaine d'années et la forme ainsi que le rivage ont déjà été modifiés plusieurs fois. De plus, en cas de cyclone, l'évacuation est très difficile. L'île est située à environ cinq heures de bateau du Bangladesh et il n'y a aucune pistes d'atterissage pour les avions. Lors de mauvaises conditions météorologiques, les résidents de l'île (donc les réfugiés rohingyas) ne recevraient pas d'aide de l'extérieur; ils seraient seuls.
Les Rohingyas, sans maisons, sans pays, doivent se contenter de vivre dans des camps de réfugiés pour survivre. Ils dépendent uniquement de l'aide qui leur est offerte afin de combler leurs besoins de base, tels la nourriture et le logement. Ils ne peuvent même pas retourner sur leur terre natale puisqu'ils risqueraient de se faire tuer. Il y a plusieurs pays, dont le Canada et les États-Unis, qui font pression sur le gouvernement myanmarais et le sanctionnent dans le but d'aider à rectifier la situation et permettre aux Rohingyas de retourner chez eux, mais sans succès. Aussi, ces deux pays se sont joints à d'autres ainsi qu'à des donateurs internationaux pour augmenter l'assistance humanitaire apportée à ces réfugiés. Le conflit prendra probablement fin seulement quand le gouvernement myanmarais va reconnaître les Rohingyas comme étant une minorité ethnique historique du territoire et les traiter comme des êtres humains, ce qui ne risque pas d'arriver prochainement.
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